BABEL 20 Novembre 2007 7
Drame américain (2006) de Alejandro Gonzalez Inarritu. Avec Brad Pitt, Cate Blanchett, Gael Garcia Bernal. 135 min.
Trois continents...étroitement liés par un même fusil de chasse.
Si de très rares oeuvres occasionnent un électrochoc émotionnel, "Babel" appartient à cette trempe là. Un évènement somme toute anodin aura des répercussions dévastatrices sur un ensemble de personnes, d'origine et d'horizon différents, touchées de près ou de loin par celui-ci.
Un homme d'affaires japonais, chasseur à ses heures, offre sa carabine à un autochtone marocain. L'arme se retrouvera dans les mains des deux fils d'un montagnard, qui le lui a racheté pour chasser les hyènes errantes. Pour attester de sa portée prodigieuse, ils partent tirer dans les environs rocailleux. La balle finira sa course dans la fenêtre d'un car touristique... Touchée à la carotide, une Américaine entre la vie et la mort (Cate Blanchett), accompagnée de son mari (Brad Pitt), résiste tant bien que mal dans cette contrée archaïque dépourvue de toute antenne médicale. De l'autre côté de l'Atlantique, à la frontière américano-mexicaine, les deux enfants de ce couple et leur gouvernante hispanique font face aux pires péripéties. Alors qu'au-delà du Pacifique, au "pays du soleil levant", le père d'une adolescente sourde-muette est recherché par la police...
Alejandro Gonzalez Inarritu, le cinéaste le plus passionnant du moment, met un terme à son triptyque à la structure éclatée, commencé avec "Amours chiennes" et "21 grammes". Touché par une grâce divine, Inarritu est à la quintessence de son art : les images sont d'une beauté saisissante, le scénario est transcendé par la verve de Guillermo Arriaga (hormis la trilogie de Inarritu, on lui doit aussi "Trois enterrements"), et le tout est sublimé par la musique hypnotique de Gustavo Santaolalla. Passant d'un continent à un autre avec une facilité déconcertante (le récit est à chaque fois interrompu à un moment crucial), il montre à quel point, malgré les disparités économiques et sociales entre pays, les préoccupations humaines demeurent basiques et universelles; à savoir aimer et être aimé.
Comme Antonioni avant lui, Inarritu dresse une formidable "parabole évangélique" où l'incommunicabilité entre les êtres est le seul obstacle à un bonheur pourtant à portée de main... Grandiose avec l'une des séquences les plus contemplatives (à en avoir la chair de poule) jamais filmées, qui voit un hélicoptère survoler les paysages marocains...
